Il y a cet homme qui a garde le reflexe de tendre la main sous la table pour caresser son chien, alors que son chien est mort. Cette femme qui boit du Get 27 pour oublier que son amant ne viendra pas. Ce militant d extreme droite qui cherche a embrigader le patron de la brasserie. A l abri des regards, dans la cuisine, il y a le rescape d une nuit d octobre. Et puis il y a l enfant. L enfant qu un adulte accompagnait mais qui est seul a present devant son verre vide. L enfant qui attend que l adulte revienne.Nous sommes en 1978, dans une brasserie pres de la cathedrale de Sens. C est un instantane de la France et d une epoque. Mais aussi le recit atemporel et poignant de la perte de l enfance, dans le bourdonnement indifferent de cette ruche francaise.Sebastien Rongier fait d un cafe une chambre d echos, ou resonnent les voix d un pays venant tout juste de basculer dans la crise. Avec les guerres mondiales et coloniales, le paysage social se decompose et se recompose. Et les differentes lignes de forces du passe et du present se croisent toutes, dans ce bar, dressant un portrait a la fois morcele et puissant du xxe siecle francais.Auteur d un premier roman en 2009 (Ce Matin, Flammarion), Sebastien Rongier publie egalement des essais d esthetique sur les formes artistiques et sur l image: Cinematiere (Klincksieck) et Theorie des fantomes. Pour une archeologie des images (Les Belles Lettres)."