" Venu tout jeune et d'un bond au premier rang dans la Résistance ", ainsi que l'écrit en tête d'un portrait flatteur le général de Gaulle dans ses Mémoires de guerre, Jacques Chaban-Delmas l'est resté dans la vie politique et a suscité des... rivalités et des attaques à la mesure de ses réussites. Pendant un demi-siècle, il a occupé le devant de la scène : général de brigade à vingt-neuf ans (1944), cet inspecteur des finances devient député à trente et un ans (1946) et maire de Bordeaux l'année suivante, pour un bail de presque cinq décennies. Cette étoile montante de la IVe République, trois fois ministre, est choisie par les députés comme premier président de l'Assemblée nationale de la Ve République. Chaban réussira l'exploit d'être au perchoir sous trois présidents de la République différents, illustration de son talent manœuvrier et de son sens de l'équilibre. Sa carrière politique culmine en 1969 lorsque Georges Pompidou le nomme Premier ministre et lui confie la tâche d'incarner la réforme. Après un discours sur la Nouvelle Société qui marque les esprits, il s'emploie pendant trois ans (juin 1969-juillet 1972) à inscrire dans les faits un programme économique et social qui fait passer la France à l'âge de la modernité industrielle. Jacques Chaban-Delmas a aussi connu les épreuves sans lesquelles il n'est pas de destin complet : ses ennemis ont tenté de l'impliquer dans certains scandales politico-financiers ; lors de la campagne présidentielle de 1974, ses amis gaullistes ont préféré la candidature de Giscard d'Estaing à la sienne. Blessé mais non vaincu, Jacques Chaban-Delmas a su revenir au premier rang de la scène politique. Le temps écoulé depuis qu'il s'est retiré de la politique active permet de cerner l'homme d'Etat dont la gauche reconnaît les réalisations et dont la droite revendique aujourd'hui la vision.